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Le stress principal facteur

L'endettement nuit à la santé des gens, selon l'Observatoire québécois des inégalités

durée 09h00
3 avril 2024
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Par La Presse Canadienne

L'endettement a des conséquences négatives sur la santé des gens, révèle une étude de l'Observatoire québécois des inégalités publiée mercredi. 

Cette note d'analyse — la troisième d'une série sur la richesse et les inégalités sociales reliées à la santé — indique que l'endettement élevé est associé à une pression artérielle plus haute, à l'obésité, à une mauvaise santé mentale et un mauvais état de santé général. 

Le stress relié à l’endettement est identifié comme le principal facteur qui affecte négativement la santé, et ce, même si la personne endettée n'a aucun problème de remboursement. 

Les personnes qui éprouvent des difficultés de remboursement vont toutefois ressentir un stress beaucoup plus élevé, souligne Geoffroy Boucher, économiste et coauteur de l’analyse. 

Il cite l’Enquête sur l’endettement des ménages québécois qui spécifie qu'au Québec, le niveau de stress qui est engendré par les dettes atteint en moyenne 2,9 sur une échelle de 1 à 10, où 1 signifie «aucun stress» et 10 un «stress extrêmement élevé». Pour les personnes qui ont du mal à rembourser leur dette, ce niveau atteint 9,8. «C'est un niveau de stress qui est très exacerbé et il en découle toutes sortes de conséquences», mentionne M. Boucher. 

«La situation d’endettement peut être associée à une certaine stigmatisation sociale, où les personnes vont tenter de cacher leur situation. Et en tentant de cacher leur situation, elles peuvent réduire leurs liens sociaux, ce qui peut entraîner une spirale de difficultés parce que le manque de liens sociaux peut engendrer également des difficultés de santé mentale et exacerber le stress», a expliqué le chercheur. 

L'étude souligne que le stress peut devenir «néfaste pour la santé lorsqu’il s’installe dans la durée ou que son intensité est élevée». Le stress chronique augmente particulièrement le risque de développer des maladies cardiovasculaires, des troubles musculosquelettiques, des troubles de la santé mentale, le risque d’accident au travail en plus d'affaiblir les défenses immunitaires. 

Dettes positives 

Tous les types de dette n'ont pas le même impact sur la santé, précise M. Boucher. Pour appuyer son propos, il cite les travaux de recherche de Maude Pugliese, de l’Institut national de la recherche scientifique, qui ont permis d’identifier cinq profils d’endettement. Ils se déclinent ainsi: les personnes qui s’endettent pour l’achat d’une maison ou d’une voiture; l'endettement provenant d’une dette d’étude; les personnes qui s’endettent pour soutenir leurs proches ou subvenir aux besoins de leurs enfants; les personnes dont les dettes découlent d’une perte d’emploi ou d’un problème de santé; une combinaison de facteurs qui va contribuer à l’endettement. 

«On voit que les difficultés d’endettement sont beaucoup plus élevées chez les trois dernières catégories et le stress lié à l’endettement est beaucoup plus élevé chez ces personnes», commente M. Boucher. 

Il affirme que la dette est une «épée à double tranchant». Elle peut être un levier d’avancement socioéconomique pour un grand nombre de personnes, mais pour ceux qui éprouvent des difficultés à rembourser les montants dus, elle peut devenir un facteur d’appauvrissement. 

Le prêt hypothécaire, par exemple, permet à beaucoup de Québécois de s'enrichir. La dette hypothécaire est le type de dette qui a le plus contribué à la croissance de la valeur de la dette totale des ménages québécois au cours des 20 dernières années. Elle est responsable de 84 % de l’augmentation de la dette des familles, dont la valeur moyenne est passée de 61 000 $ en 1999 à 113 400 $ en 2019.  

Par ailleurs, les ménages québécois affichent un niveau d’endettement sous la moyenne des provinces canadiennes. L’Ontario et la Colombie-Britannique ont les niveaux d'endettement les plus élevés, indique l'étude, notamment en raison du prix des propriétés immobilières. 

Inégalités en termes d'accès au crédit  

Environ une personne sur cinq qui fait une demande de crédit se la fait refuser au Québec. La proportion est plus élevée chez les hommes, les Autochtones, les personnes racisées et les personnes à plus faible revenu.

«Ces catégories de personnes, si elles obtiennent du crédit, c’est souvent à des conditions plus défavorables, avec des taux d’intérêt beaucoup plus élevés, ce qui peut les mettre dans une situation plus précaire lorsqu’il y a un changement dans leur situation personnelle ou un changement dans la conjoncture économique», indique M. Boucher

«L’exclusion financière qui va découler des inégalités en matière d’accès au crédit va nuire à l’accumulation de richesse chez les familles moins nanties et va contribuer à accentuer les inégalités de richesses», poursuit-il. 

La capacité d’emprunt ne va pas baisser le stress, précise-t-il. Toutefois, la capacité d’emprunt va permettre de faire davantage face à des situations difficiles dans la vie, comme une perte d'emploi, une maladie ou des taux hypothécaires qui grimpent rapidement. «C’est vraiment lorsque les difficultés de remboursement se manifestent que l’impact sur la santé va être encore plus délétère», affirme M. Boucher. 

La faillite constitue le dernier recours des personnes qui sont très endettées et elle est en hausse au Québec comme ailleurs au Canada. En 2022 au Québec, 25 433 dossiers ont été déposés au Bureau du surintendant des faillites du Canada contre 23 667 en 2021, ce qui représente une augmentation de 7,5 %.

M. Boucher a toutefois espoir que les autorités concernées changent les choses, notamment en favorisant l’éducation financière et la protection des consommateurs et en misant sur l’inclusion financière des plus vulnérables. D'ailleurs, des pistes de solutions seront discutées lors du «Forum patrimoine et santé» de l'Observatoire québécois des inégalités, qui a lieu mercredi à Montréal. 

Le contenu en santé de La Presse Canadienne obtient du financement grâce à un partenariat avec l’Association médicale canadienne. La Presse Canadienne est l’unique responsable des choix éditoriaux.

Katrine Desautels, La Presse Canadienne

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