Une coalition de festivals réclame d'Ottawa un meilleur appui financier
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Par La Presse Canadienne, 2024
MONTRÉAL — La poussée inflationniste a encore donné du fil à retordre aux festivals et événements majeurs du Canada en 2024. Une coalition représentant plusieurs d'entre eux revendique un meilleur soutien financier, qui donne plus de prévisibilité, de la part du gouvernement fédéral.
Festivals et événements majeurs (FAME) parle de 2024 comme d'une «année sombre». La coalition a recensé au moins une douzaine de rendez-vous à la grandeur du pays qui ont diminué leur offre, cessé leurs activités ou décidé de prendre une pause.
«Ce qu'on perçoit partout, c'est qu'il y a des difficultés sérieuses (...) Si la pandémie a été un tremblement de terre (pour le secteur), ce qui a suivi, la vague inflationniste, c'est un tsunami», indique le directeur général de FAME, Martin Roy, en entrevue.
Depuis 2023, les coûts d'exploitation ont connu une «augmentation spectaculaire», affirme M. Roy. Plusieurs organisateurs lui ont mentionné qu'il en coûte maintenant entre 30 et 40% de plus pour tenir un événement par rapport à 2019.
Cette hausse s'explique entre autres par une rareté de la main-d'œuvre et des fournisseurs au sein de l'industrie.
«Il y a quand même de plus en plus de festivals. Et ça aussi, ça a quand même un effet inflationniste. À partir du moment où, sur un même week-end, vous avez trois, quatre ou sept événements comparables en compétition dans une région ou dans une ville, cela peut avoir une incidence aussi sur les coûts d'opération et sur la disponibilité de la main-d'œuvre, des artistes, des fournisseurs, etc.», fait valoir M. Roy.
Revoir le financement
Il précise que le phénomène s'observe à l'échelle internationale. Mais Ottawa pourrait tout même faire mieux en matière de financement, estime la coalition.
D'après FAME, le fédéral doit bonifier le budget de deux programmes de Patrimoine canadien visant à soutenir les événements, afin de tenir compte de l'inflation. Il s'agit de Fonds du Canada pour la présentation des arts et Développement des communautés par le biais des arts et du patrimoine.
La coalition demande surtout de revoir la manière dont le ministère ajoute des sommes au financement de base des deux programmes. FAME souhaite que cet argent additionnel soit déjà intégré aux bases budgétaires. Cela permettrait, selon la coalition, de pérenniser ces montants et d'offrir une meilleure prévisibilité, sans devoir faire de nouvelles démarches auprès du gouvernement pour reconduire cette enveloppe supplémentaire presque année après année.
Cette aide additionnelle représente environ le tiers du budget total de 72,7 millions $ réservé jusqu'en 2025-2026.
«Depuis 2019, ces sommes-là sont devenues à la fois indispensables et insuffisantes, parce qu'elles ne font pas en sorte que les subventions augmentent. Au contraire, elles continuent de diminuer», dit M. Roy, qui est aussi président-directeur général du Regroupement des événements majeurs internationaux (RÉMI).
«Il va falloir se battre encore d'ici 2026 pour reconduire ces sommes-là», ajoute-t-il.
M. Roy estime également que le fédéral doit éventuellement concevoir un programme dans lequel les festivals et les événements seraient considérés comme des moteurs économiques et touristiques.
Les investissements seraient alors réalisés en fonction de ce que cette industrie «peut rapporter en termes touristiques et de retombées économiques. De ne pas regarder les festivals et les événements seulement par la lorgnette culturelle», soutient-il.
Ottawa pourrait s'inspirer du gouvernement du Québec, dont le ministère du Tourisme appuie aussi des événements lorsqu'ils attirent des visiteurs de l'extérieur, affirme M. Roy.
«Le gouvernement du Québec est le gouvernement provincial qui en fait le plus par rapport à l'industrie. Et d'ailleurs, ici, on peut vraiment parler d'une industrie des festivals et des événements, sinon des événements majeurs internationaux, parce qu'on travaille comme tel; il y a des échanges entre les festivals. On est structuré comme une industrie, ce qui n'est pas toujours le cas à l'extérieur du Québec», expose-t-il.
Le FAME salue tout de même les aides ponctuelles qui ont été réservées à certains événements dans le cadre de l'énoncé économique du gouvernement Trudeau, présenté la semaine dernière. Il contenait un total de 10 millions $ en mesures ciblées touchant cinq festivals, comme le Carnaval des Caraïbes de Toronto.
«Je me réjouis de ces coups de pouce qui sont donnés à l'un et à l'autre. Mais c'est sûr qu'on ne peut pas procéder de façon individuelle pour des centaines de festivals et événements. On ne s'en sortira pas. Si on en aide cinq par année, on risque de mettre plusieurs années avant de régler le problème pour l'ensemble des festivals canadiens», commente M. Roy, qui espère au moins que le pire est désormais passé pour ce qui est de l'inflation.
Frédéric Lacroix-Couture, La Presse Canadienne