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Une ancienne technologiste médicale dénonce la fusion des laboratoires dans une BD

durée 10h00
13 juillet 2024
The Canadian Press, 2024
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Temps de lecture   :  

4 minutes

Par The Canadian Press, 2024

MONTRÉAL — Une ancienne technologiste médicale, qui a quitté la profession il y a une dizaine d'années en raison de la centralisation des laboratoires, a créé une bande dessinée pour dénoncer la réorganisation qui s'opère dans le réseau de la santé et démystifier cette profession méconnue.

Les technologistes médicaux effectuent des analyses qui permettent au médecin de poser un diagnostic, de proposer un suivi et un plan de traitement. Environ 85 % des diagnostics et des suivis thérapeutiques reposent sur les résultats de laboratoire.

Chaque année, ce sont 208 millions d’échantillons qui sont traités dans les laboratoires du Québec.

Il existe plusieurs grands secteurs d'activité de la profession de technologistes médicaux. Emilie Tremblay, doctorante en communication à l'UQAM, a commencé sa carrière en microbiologie avant de travailler pour un laboratoire central qui regroupe la biochimie, l'hématologie et la banque de sang.

Après 10 ans à travailler en tant que technologiste, elle a pris la décision de quitter son emploi en 2013 lorsqu'elle a su qu'une restructuration allait s'effectuer.

OPTILAB est un projet de réorganisation des laboratoires de biologie médicale. Sur le site internet du ministère de la Santé, on explique qu'auparavant il y avait quelque 500 unités administratives et que l'objectif d'OPTILAB est de regrouper les 34 laboratoires d'hôpitaux en 12 grappes. Déployée en 2017, cette fusion se poursuit toujours.

Mme Tremblay a consacré son mémoire de maîtrise et maintenant sa thèse au doctorat pour aborder les enjeux vécus par les technologistes médicaux. Elle souligne que le public connaît peu le rôle qu'ils jouent dans le parcours du patient. «Je voulais raconter leur histoire. C’est pourquoi j’ai consacré mon mémoire et maintenant ma thèse à leur donner une meilleure visibilité, dit-elle.

«Je tenais à lui rendre hommage parce que même si j'ai changé de métier c'est une profession pour laquelle j'ai beaucoup de respect et je vois son importance dans notre milieu de santé.»

Les impacts sur le patient

La doctorante a fait une bande dessinée dans le cadre de Vulgarisathon, un projet organisé dans le cadre des Journées de la relève en recherche de l’Acfas, qui a pour but que les étudiants du cycle supérieur découvrent la vulgarisation sous d'autres formes.

L'apprenti bédéiste a aussi présenté en mai dernier sa bande dessinée constituée de trois planches à dessin dans le cadre du Festival BD de Montréal.

Sa première planche porte sur les effets de la création d’OPTILAB sur le système de santé, la seconde sur le contexte de travail, et la troisième sur la nature du travail de technologiste médicale.

Mme Tremblay est d'avis que la fusion des laboratoires a eu un impact sur la qualité des échantillons et sur le travail des professionnels.

À titre d'exemple, elle mentionne que la Côte-Nord est maintenant affiliée au CIUSSS du Saguenay-Lac-Saint-Jean. «Ça change complètement le portrait des laboratoires. (...) Il y a plusieurs effets au niveau de la qualité des soins, de la rétention du personnel, du sentiment d'appartenance qu'on peut déjà voir se manifester à travers les fusions OPTILAB et qui va se manifester à travers Santé Québec assurément aussi.»

Les tâches des technologistes qui travaillent en région éloignée se transforment, soutient Mme Tremblay. Ils doivent par exemple mettre des tubes dans des valises qui sont envoyées au laboratoire central, qui lui, croule sous les échantillons, selon la doctorante.

Dans ses recherches, elle conclut qu'il est important de consulter plusieurs types de professionnels en amont des restructurations. «Au-delà de penser à résoudre les coûts du système de santé, il faut avant tout s'assurer: est-ce que tous les citoyens du Québec ont la même qualité de soins, peu importe son lieu de résidence? Ça, je pense qu'on est en train de l'oublier et de prioriser l'optimisation du coût», soulève Mme Tremblay.

Elle craint qu'avec la nouvelle agence Santé Québec, les dirigeants des grands centres prennent des décisions en oubliant plusieurs réalités régionales.

Dans sa bande dessinée, elle met en scène un médecin qui annonce à son patient que son spécimen de biopsie a été perdu dans le transport alors il faut le reprendre. Or, faire une biopsie d'une tumeur par exemple, ce n'est pas une mince tâche et on ne peut pas recommencer à l'infini.

Mme Tremblay explique comment un échantillon peut se perdre en faisant écho à la fusion des laboratoires.

«Si le spécimen doit faire 500 km avant d'être analysé, ç'a des effets sur la qualité du spécimen, mais aussi sur l'analyse, dit-elle. C'est tout cela un peu que je veux démontrer.»

Selon Mme Tremblay, d'autres professions dans le système de santé sont transformées lorsque des changements importants sont mis en place. Elle souhaiterait que le gouvernement consulte davantage ceux qui travaillent sur le terrain avant de mettre en œuvre de grandes restructurations.

Le contenu en santé de La Presse Canadienne obtient du financement grâce à un partenariat avec l'Association médicale canadienne. La Presse Canadienne est l'unique responsable des choix éditoriaux.

Katrine Desautels, La Presse Canadienne