Un juge rejette l'accord de restructuration de La Baie d'Hudson


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Par La Presse Canadienne, 2024
TORONTO — Un juge ontarien a rejeté samedi soir l'accord de restructuration de La Baie d'Hudson, augmentant ainsi la probabilité que les prêteurs cherchent à placer l'entreprise sous séquestre.
Dans une décision écrite rendue samedi, le juge Peter Osborne de la Cour supérieure de l'Ontario a indiqué qu'il refusait d'approuver l'accord, estimant qu'il n'était «ni nécessaire ni approprié pour le moment».
L'entente n'aurait pas seulement accordé au grand magasin en difficulté une date limite d'avril pour sauver ses magasins restants, mais aurait également conféré un pouvoir accru sur le processus de protection contre les créanciers de l'entreprise aux prêteurs garantis de premier rang du détaillant, soit Bank of America, Restore Capital et Pathlight Capital.
L'accord aurait imposé un budget hebdomadaire à l'entreprise. La Baie d'Hudson aurait dû rendre compte régulièrement à ses prêteurs, des entreprises dont les prêts ont des garanties, leur permettant ainsi de saisir les actifs du détaillant pour couvrir leurs dettes impayées.
Si La Baie d'Hudson concluait une entente avec un nouvel acheteur pour l'entreprise, l'accord aurait également nécessité l'approbation des prêteurs.
Le juge Osborne a avancé qu'il était «réticent» à approuver l'accord, notamment parce que le budget n'avait pas été soumis à l'examen du tribunal ni des autres parties prenantes et qu'il aurait accordé aux prêteurs des droits et des protections «à l'exclusion des autres parties prenantes».
Il a également déclaré que le contrôleur nommé par le tribunal pour guider La Baie d'Hudson dans sa procédure de protection contre les créanciers est suffisant pour équilibrer les droits des prêteurs et ceux des autres parties prenantes.
La décision du juge marque la dernière étape de la procédure de protection contre les créanciers qui engloutit la plus ancienne entreprise canadienne depuis qu'elle a admis, le 7 mars, que ses difficultés financières étaient si importantes qu'elle reportait les paiements aux propriétaires et aux fournisseurs.
Dans le cadre de cette procédure, La Baie d'Hudson a commencé cette semaine à liquider tous ses 80 magasins, sauf six, dont 13 Saks Off Fifth et trois Saks Fifth Avenue. Les six magasins épargnés jusqu'à présent sont répartis entre les régions du Grand Toronto et du Grand Montréal. L'entreprise a également négocié une marge de manœuvre pour ajouter ou retirer d'autres magasins de la liquidation.
Des désaccords devant la cour
L'accord de restructuration était tendu, car certains le considéraient comme l'un des seuls obstacles empêchant les prêteurs de La Baie d'Hudson de demander au tribunal la mise sous séquestre du détaillant.
La mise sous séquestre est une procédure par laquelle un tiers se voit confier le contrôle des actifs d'une entreprise afin de rembourser les créanciers.
Les avocats représentant La Baie d'Hudson et les prêteurs garantis de premier rang n'ont pas souhaité commenter dans l'immédiat la décision du juge Osborne samedi.
De nombreux prêteurs ont plaidé en faveur de l'accord devant le tribunal la semaine dernière.
«Nous ne voulons pas nous battre. Nous ne voulons pas déposer de demande de mise sous séquestre, avait souligné jeudi Linc Rogers, avocat de Restore Capital, prêteur de La Baie d'Hudson. Nous examinons ce tribunal et affirmons qu'il existe une meilleure solution.»
Cependant, des propriétaires comme Ivanhoé Cambridge, Oxford Properties, Cushman and Wakefield, Morguard, le Fonds de placement immobilier RioCan, Real Estate Investment Trust et KingSett Capital ont estimé que la meilleure solution était de ne pas approuver l'accord.
Ils ont préféré que l'entreprise s'appuie sur un autre processus déjà en cours, qui verra La Baie d'Hudson examiner les offres d'acheteurs potentiels pour l'ensemble de ses activités ou de ses actifs.
David Bish, avocat de Cadillac Fairview, propriétaire de 16 des propriétés où La Baie d'Hudson possède des grands magasins, a estimé que l'acceptation de l'accord de restructuration entraverait toute évolution pour le détaillant en confiant de fait le contrôle de l'avenir de l'entreprise aux prêteurs.
«Ils ne sont pas incités à restructurer. Ils sont incités à liquider», avait soutenu Me Bish devant le tribunal jeudi.
Me Rogers, qui représente le prêteur Restore, a exprimé son désaccord.
Il a même proposé à un moment donné de modifier l'accord afin d'accorder à La Baie d'Hudson quelques semaines supplémentaires pour éviter la liquidation des six magasins, affirmant que son client était «prêt à assumer des risques supplémentaires» pour désamorcer la situation.
De son côté, La Baie d'Hudson a plaidé en faveur de l'approbation de l'accord par le tribunal, mais son avocat a affirmé que ce n'était pas le type d'arrangement que son client souhaitait.
«L'accord manquait de temps, de nombre de magasins et de latitude que La Baie d'Hudson aurait souhaité», a affirmé Ashley Taylor.
La Presse Canadienne