Les célibataires québécois épargnent moins que les couples, révèle un sondage
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Par La Presse Canadienne, 2024
MONTRÉAL — «L’impôt sur le célibat» était une forme de taxation qui exigeait, de l’époque de la Rome antique jusqu’à la fin du 20e siècle dans certains pays, que les personnes vivant seules paient davantage d’impôt que les couples et les familles, sous prétexte que leur charge financière était moins élevée.
Heureusement pour elles, cette pratique jugée discriminatoire n’existe plus aujourd’hui. Malgré tout, les célibataires du Québec éprouvent plus de difficultés à gérer leur budget quotidien et économisent moins pour leur retraite que les personnes en couple, révèle un sondage effectué par le Groupe Co-operators.
«Les perspectives à long terme sont plus sombres pour les célibataires, ce qui soulève la question: peut-on parler d’un impôt sur la retraite pour les célibataires? Selon les réponses au sondage, il semblerait que oui», affirme Co-operators dans un communiqué de presse.
«Bon nombre de célibataires ont toujours du mal à équilibrer leurs dépenses quotidiennes, ce qui assombrit leurs perspectives financières pour l’avenir et les empêche de mettre de l’argent de côté», ajoute la coopérative canadienne, qui gère plus de 35,1 milliards $ d’actifs.
L’une des raisons est fort simple: les coûts fixes, comme le loyer et l’électricité, sont plus élevés lorsqu’ils ne sont pas divisés avec un partenaire ou un colocataire.
Selon cette enquête, 39 % des personnes seules considèrent qu’il est quasiment impossible d’épargner pour la retraite et 34 % mettent de côté moins de 25 $ par mois, si bien que près d’un tiers (29 %) d’entre elles ont moins de 5000 $ d’économies en prévision du moment où elles arrêteront de travailler.
Leurs préoccupations sont partagées par le tiers des résidants du Québec: 34 % trouvent irréaliste que les célibataires épargnent suffisamment en vue de leur retraite. Dans l’ensemble du pays, cette proportion grimpe à 40 %.
Ce pessimisme pousse 64 % de la population canadienne à croire que les personnes vivant seules devront se résigner à habiter un jour avec des proches ou des membres de leur famille pour être en mesure de bien gérer leur budget.
Des statistiques surprenantes
Patrick Décarie, vice-président régional du Québec chez Co-operators, avoue avoir été étonné par les résultats du sondage mené par la firme Léger.
«On trouve particulièrement surprenant que 34 % des célibataires mettent moins de 25 $ par mois à des fins d’épargne et d’investissement, ce qui est très peu, comparativement à 27 % pour les couples. Il y a donc vraiment une grosse différence entre les deux», indique-t-il en entrevue.
Il cite aussi la statistique selon laquelle 29 % des célibataires possèdent moins de 5000 $ d’économies. «C’est 19 % pour les couples, donc il y a quand même un grand écart.»
M. Décarie a également pris bonne note que «les gens qui n’ont pas de conseiller financier mettent moins d’argent de côté, alors qu’ils pourraient peut-être se permettre d’en mettre un peu plus».
Selon lui, c’est peut-être justement parce qu’ils manquent de conseils que de plus en plus de célibataires optent pour un CELI (59 %), tandis que les REER sont sous-utilisés (36 %).
«Les gens qui ont un conseiller financier vont souvent faire plus d’économies. Ça ne veut pas dire qu’ils ont pris les mauvais véhicules de placements, mais on voit vraiment qu’il y a une tangente vers les CELI, alors que les REER pourraient aussi leur rapporter beaucoup. Est-ce que c’est parce qu’ils manquent de conseils?»
Personnellement, sa première suggestion est de maximiser ses cotisations à un REER.
«C’est un bon moment de l’année pour dire qu’il faut maximiser ses REER. Le REER, bien entendu, permet des économies au niveau fiscal. C’est un véhicule de placement très intéressant pour sauver de l’impôt.»
La confiance en hausse
Devant ces conclusions, Co-operators indique que «les conseils financiers doivent refléter les défis uniques auxquels sont confrontés les célibataires, en particulier à l’approche de la date limite pour cotiser à un REER», fixée au 3 mars pour l’année d’imposition 2024.
«Les célibataires ne devraient pas être pénalisés, mais il est clair que le fait d’avoir un ou une partenaire, quelqu’un qui partage vos objectifs financiers et qui travaille avec vous pour les atteindre, est un facteur de sécurité financière et de résilience», souligne Jess Baker, première vice-présidente et cheffe des ventes au détail de Co-operators.
«Les gens ont besoin d’une communauté. Des conseils et une planification personnalisés constituent l’un des moyens les plus accessibles et efficaces pour combler cette lacune lorsqu’il s’agit de vos finances», ajoute-t-elle.
Par ailleurs, le sondage de Co-operators démontre que les Canadiens ont davantage confiance dans leurs finances personnelles qu’au cours des années précédentes. De 2023 à 2025, le niveau d’optimisme est passé de 33 % à 35 %, puis à 37 %.
«Bien que nous nous réjouissions d’apprendre que les gens commencent à se sentir plus à l’aise financièrement, les données montrent que les jeunes générations demeurent vulnérables et ne parviennent pas à concilier le coût de la vie et l’épargne en vue de la retraite. On suppose que les jeunes et les célibataires vivent dans l’insouciance, mais ce n’est manifestement pas le cas», soutient Mme Baker.
Sébastien Auger, La Presse Canadienne