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Le microbiome influencerait le déficit immunitaire inné

durée 06h00
18 février 2025
La Presse Canadienne, 2024
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Temps de lecture   :  

3 minutes

Par La Presse Canadienne, 2024

MONTRÉAL — Le microbiome intestinal pourrait expliquer pourquoi les patients nés avec un déficit immunitaire ne sont pas tous affectés de la même manière par le problème, indique une étude à laquelle a participé une scientifique montréalaise.

Les chercheurs ont en effet constaté que la flore intestinale des patients qui ne présentent que peu de symptômes est différente de celle des patients chez qui la présentation de la maladie est plus sévère.

Cela pourrait permettre d'identifier de nouveaux patients et de prendre en charge plus rapidement les patients dont la condition risque de se détériorer, mais aussi potentiellement ouvrir de nouvelles avenues thérapeutiques.

«Le microbiome intestinal a un rôle super important, il est en lien étroit par différents mécanismes avec nos réponses immunitaires, tant au niveau local, c'est-à-dire au niveau de la barrière intestinale, mais aussi au niveau systémique, dans le corps», a rappelé un des auteurs de l'étude, la docteure Emilia Liana Falcone, de l’Institut de recherches cliniques de Montréal.

La nouvelle étude, poursuit-elle, porte spécifiquement sur des patients nés avec un variant génétique qui fait en sorte que leur système immunitaire n'est pas aussi efficace qu'il devrait l'être.

Ce qui est «fascinant» chez ces patients, a dit la docteure Falcone, est le fait que «la présentation ou la sévérité de la présentation clinique varie énormément», même s'ils ont tous plus ou moins le même variant génétique.

On retrouvera à un bout de l'échelle des patients qui n'ont aucun symptôme, et à l'autre des patients gravement malades.

«J'ai même étudié des jumeaux identiques qui avaient la même mutation, a dit la docteure Falcone. Il y en a un qui n'avait rien et l'autre qui avait le spectre le plus extrême de la maladie.»

C'est le constat que des facteurs comme la génétique et l'environnement ne pouvaient pas à eux seuls expliquer ces différences qui a mis les chercheurs sur la piste du microbiome intestinal, puisqu'il peut varier grandement d'un individu à l'autre et qu'on sait qu'il entretient une relation étroite avec le système immunitaire.

Les auteurs de l'étude ont tout d'abord constaté que certaines bactéries étaient beaucoup plus prononcées chez les patients qui présentaient le déficit immunitaire. Une collaboration avec des collègues européens leur a ensuite permis de déterminer qu'il s'agissait-là d'une signature du microbiome spécifique à ces patients.

La découverte suivante a porté sur le métabolome de ces patients, à savoir l'ensemble des substances produites par les bactéries et les microbes eux-mêmes. Ici encore, les chercheurs ont mesuré des différences importantes entre les patients sains, ceux atteints d'une maladie peu sévère et ceux atteints d'une maladie grave.

Cela démontre qu'il y a des associations entre le microbiome et la sévérité de la maladie, et ça ouvre la porte à des études futures pour vérifier si on peut utiliser cette signature pour diagnostiquer les patients, a dit la docteure Falcone, et les prendre en charge le plus rapidement possible.

On pourrait par exemple envisager de dépister des patients diabétiques pour vérifier si ce déficit immunitaire ne serait pas à l'origine de leur maladie, a-t-elle cité en exemple.

«Mais moi la chose qui m'intéresse vraiment, c'est de savoir si on peut utiliser ça pour prédire qui va développer une maladie sévère dans le futur», a-t-elle ajouté.

Cette découverte ouvre aussi la voie, évidemment, à une manipulation du microbiome intestinal, par exemple avec une greffe fécale, «pour ralentir la maladie ou prévenir une évolution néfaste», a souligné la docteure Falcone.

Les conclusions de cette étude ont été publiées par le journal médical Microbiome.

Jean-Benoit Legault, La Presse Canadienne