Le congé de TPS a été beaucoup de travail pour peu de gain, selon des entreprises
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Par La Presse Canadienne, 2024
TORONTO — Le congé de TPS offert pendant près de deux mois par Ottawa laisse des propriétaires d'entreprises canadiennes du commerce de détail et de l’hôtellerie avec un sentiment mitigé, certaines affirmant que l’incitation gouvernementale a donné un petit coup de pouce à leur entreprise, quand d’autres n’ont constaté aucun impact.
Environ deux mois après que le gouvernement fédéral a temporairement supprimé la TPS sur une gamme de produits axés sur les Fêtes, Dave Doyon dit qu'il considère cette mesure comme «un cadeau», même si la vague de ventes espérée ne s'est jamais pleinement matérialisée.
Ses magasins de jouets Imaginaire ont vu leurs ventes augmenter de 15 % en janvier, mais il est difficile de déterminer si cela est dû à l'allègement fiscal plutôt qu'au marketing, aux caprices des acheteurs ou aux personnes à la recherche de plus de divertissements à l'intérieur en cette période de froid.
Même si l'augmentation des ventes d'Imaginaire est entièrement due à l'allègement fiscal qui prend fin samedi, M. Doyon doute de l'ampleur de la différence que cela a fait dans le grand ordre des choses. Le but de l'allègement, après tout, était de faire économiser de l'argent aux consommateurs plutôt que de les convaincre de dépenser plus.
«Le montant que vous économisez est pour moi un peu trop minimaliste pour avoir un réel impact sur votre vie ou sur votre budget, a mentionné M. Doyon lors d'une entrevue quelques jours avant la fin de l'allègement. Nous avons tous économisé quelques dollars ici et là, mais êtes-vous allés en Floride cette année parce que nous avions cette réduction de 5 % ? Je ne l’ai pas fait, donc pour moi, c’est trop peu pour avoir un réel impact sur la vie des Canadiens.»
Du travail en plus
Des entreprises qui ont bénéficié d’un coup de pouce disent que la décision soudaine de supprimer la taxe sur certains jouets, vêtements pour enfants, produits d’épicerie et repas au restaurant a représenté beaucoup de travail pour peu de gain.
Le magasin de jouets Swag Sisters, par exemple, n’a pas connu de hausse significative qu’il attribue à l’allègement de la TPS que le premier ministre Justin Trudeau a mis en place pour aider les Canadiens à faire face aux dépenses et tenter de raviver sa popularité en chute libre.
En fait, la période d’allègement annoncée le 21 novembre a obligé le détaillant torontois à se démener pendant la saison la plus chargée de l’industrie pour être prêt à offrir la réduction lorsqu’elle devait entrer en vigueur moins d’un mois plus tard.
«Cela a représenté beaucoup de travail pour nous de mettre en œuvre cette mesure, car, même si nous sommes un magasin de jouets, seuls 65 % de nos produits étaient éligibles», a expliqué la commerçante Erin Salisbury dans un courriel.
Comme elle et d'autres détaillants l'ont rapidement découvert, la liste des produits éligibles à l'allègement de la TPS établie par le gouvernement était truffée de nuances. La taxe a été supprimée pour des articles comme les livres imprimés, mais pas pour les livres de coloriage, d'autocollants, de pièces de monnaie ou de timbres.
Les acheteurs ont également bénéficié d'un allègement sur les casse-têtes, les jeux de société et de cartes, mais pas s'ils étaient destinés aux enfants de plus de 14 ans ou aux adultes, et sur les jouets, mais seulement s'ils imitaient d'autres articles, comme les camions, les voitures et les poupées ou étaient considérés comme des jouets de construction comme les Lego, la pâte à modeler ou les blocs de construction.
Une fois que les entreprises ont compris ce qui était inclus, leur travail n'était pas terminé.
«Nous avons dû parcourir ligne par ligne 4000 articles pour effectuer les changements», a mentionné Mme Salisbury, qui devra annuler tous les ajustements ce week-end.
L'expérience décevante de son magasin avec l'allègement fiscal était à peu près la même chez Metro Inc., où le PDG Eric La Flèche a déclaré qu'il n'y avait pas eu d'augmentation du volume de produits vendus dans ses épiceries.
Moins de transactions
Les Canadiens semblent également faire moins de courses. Le processeur de paiement Moneris a constaté que le nombre de transactions dans tous les magasins du pays entre le 14 décembre et le 15 janvier a diminué de 1 % par rapport à la même période l'année précédente. Les dépenses totales ont chuté de 4 %.
Même les provinces et les territoires qui ont réduit leur taxe de vente pour égaler l'allègement fiscal du gouvernement fédéral ont connu une baisse. Les transactions en Ontario ont chuté de 3 % et les chiffres dans le Canada atlantique sont restés inchangés, selon les données.
Les entreprises qui s'attendaient à être parmi les plus grands bénéficiaires de la pause de la TPS ont également connu des difficultés. Les magasins de loisirs, de jouets et de jeux ont vu le montant des transactions diminuer de 5 %, d'après Moneris.
«Les modestes économies liées à l'allègement fiscal ne semblent pas avoir séduit les consommateurs, a conclu le directeur du développement commercial de Moneris, Sean McCormick. Sa courte fenêtre de deux mois a probablement encore plus limité la possibilité pour les consommateurs de planifier et de faire des achats significatifs.»
Il y a néanmoins eu quelques points positifs. Moneris a constaté que les transactions dans les magasins de vêtements pour enfants ont augmenté de 8 %, bien que le montant dépensé chez les détaillants soit resté inchangé.
La plateforme de réservation OpenTable a également constaté une augmentation de 22 % du nombre de réservations en ligne pour des dîners assis dans des restaurants canadiens entre le 14 décembre et le 11 février par rapport à l'année précédente.
Des données d'enquête de Restaurants Canada ont aussi montré qu'il y avait une augmentation modeste de la fréquence à laquelle les Canadiens ont dîné au restaurant en décembre par rapport à décembre 2023. La hausse a persisté pendant le reste de la période de la TPS et a été suffisante pour que le groupe industriel commence à demander que l'allègement soit prolongé ou rendu permanent.
Dave Doyon soupçonne que de nombreuses autres industries ne ressentent pas aussi fortement que Restaurants Canada, car l'incitation n'a représenté que quelques dollars d'économies sur de nombreux achats.
«Je ne connais personne qui soit allé acheter un jeu de société parce qu'il était à 5 % de réduction, a-t-il avancé. Je dirais que, pour moi, la baisse de la TPS n'a pas créé de ventes, mais qu'elle a peut-être incité les gens à (acheter quelque chose) ce mois-ci au lieu d'attendre.»
Pourtant, les entreprises affirment que ce comportement a été passager alors que le pays a atteint les derniers jours de l'allègement de la TPS.
Non seulement les clients doivent faire face à la chute récente du huard à son plus bas niveau depuis des années, mais ils se préparent également à ce que leurs comptes bancaires soient touchés par l'intensification des menaces américaines d'imposer des tarifs sur les produits canadiens.
Entreprises dans cette histoire : (TSX : MRU)
Tara Deschamps, La Presse Canadienne