La Fonderie Horne lance un programme volontaire de biosurveillance à l’arsenic
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Par La Presse Canadienne, 2024
MONTRÉAL — La Fonderie Horne de Rouyn-Noranda a annoncé le lancement d’un programme volontaire de biosurveillance à l’arsenic pour ses employés, leur famille, leur entourage et certains citoyens du secteur.
L’entreprise, qui émet des émissions d’arsenic beaucoup plus élevées que ce qui est autorisé par la norme provinciale, a annoncé, jeudi matin, qu’elle permettra à des centaines de personnes de participer à une étude de biosurveillance.
Cette étude s’adressera principalement aux employés et à leurs proches, mais les résidants de Rouyn-Noranda qui souhaitent y participer peuvent en faire la demande.
L’objectif du programme est double, a expliqué le directeur général de la Fonderie Horne, Vincent Plante, en conférence de presse.
L’entreprise veut «fournir à nos employés, à leur famille et à leur entourage résidant à Rouyn-Noranda l’opportunité d’évaluer leur exposition biologique à l’arsenic, ainsi que mieux documenter et comprendre l'exposition biologique au niveau communautaire».
Échantillon d’urine, ongles et air ambiant
Glencore, propriétaire de la fonderie, a mandaté la firme indépendante Intrinsik pour procéder à l’étude qui débutera en avril prochain et qui devrait durer dix mois.
Pendant cette période, Intrisink recueillera cinq fois des échantillonnages d’urine auprès des volontaires et un échantillonnage d’ongles d’orteils.
Il est également prévu qu’une «série d’échantillonnages de sols et de poussières intérieures» soient collectés «chez chaque participant qui y consentira, selon un calendrier bien précis».
Les résultats individuels «seront transmis aux participants qui y auront consenti» et «les résultats communautaires seront présentés aux participants ainsi qu’à l’ensemble de la communauté en avril 2026», a expliqué Glencore dans un communiqué.
Concentration d’arsenic dans les ongles d’enfants
La Santé publique avait réalisé une étude de biosurveillance à Rouyn-Noranda en 2018.
Les résultats montraient notamment que les concentrations d’arsenic dans les ongles des citoyens de ce quartier étaient en moyenne 3,7 fois plus élevées que celles observées auprès de la population d’Amos, une ville de la région.
L’étude avait également souligné qu’une concentration élevée d’arsenic peut entraîner une augmentation du risque cancérigène.
En mars 2023, le gouvernement a exigé que la Fonderie Horne mette en place un plan qui lui permette de respecter le seuil de 15 nanogrammes par mètre cube (ng/m3) d’arsenic à partir de 2027, ce qui serait, si la fonderie respecte la cible, cinq fois plus élevé que la norme environnementale, qui est de 3 ng/m3.
L’entente précédente avec Glencore, qui avait été signée avec le gouvernement libéral en 2017, permettait que les émissions d’arsenic de la fonderie atteignent une moyenne annuelle de 100 ng/m3, soit 33 fois plus que la norme.
Au printemps 2023, le gouvernement a également imposé à l’entreprise qu’elle présente un plan d’action d’ici 2027, pour éventuellement atteindre la norme 3 ng/m3.
Des Mères au front manifestent à Québec
Au même moment où les dirigeants de la fonderie annonçaient le lancement d’un programme volontaire de biosurveillance à l’arsenic, des militantes du groupe Les Mères au front dénonçaient, une fois de plus, la permission accorder à Glencore de dépasser les normes d’émission de polluants de la province.
Celles-ci se sont rendues à l’Assemblée nationale, jeudi, avec l’intention notamment de distribuer des exemplaires du nouveau livre «Zones sacrifiées» à certains députés.
«Alors que nous assistons, impuissants, à l’effritement de la démocratie et du bien commun, nous avons ici la possibilité d’agir et de faire en sorte que le gouvernement arrête de sacrifier impunément une partie de sa population», a mentionné Anaïs Barbeau-Lavalette, coinstigatrice de Mères au front et coauteure du livre Zones sacrifiées.
Dans un communiqué, Les Mères au front ont indiqué qu’une «performance artistique s’est tenue à l’extérieur devant l’Assemblée nationale».
Le même communiqué indique que les militantes se sont rendues à l’Assemblée nationale pour exiger que «la Fonderie Horne respecte enfin les normes d’émission québécoises pour tous les contaminants toxiques, dont l’arsenic. Que le gouvernement du Québec cesse d’ignorer la crise sanitaire à Rouyn-Noranda et prenne des mesures immédiates et que les élus rendent des comptes et arrêtent de privilégier les intérêts des multinationales au détriment de la santé publique».
Des émissions liées au risque de cancer
Les émissions d’arsenic de la Fonderie Horne sont associées à un risque estimé accru de cancer.
À l’été 2022, un rapport de l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) révélait que, sur une période de 70 ans, un nombre excédent de citoyens de Rouyn-Noranda, entre un et 14, développeraient un cancer si l’entreprise Glencore ne diminuait pas la concentration d’arsenic dans l’air produit par la fonderie.
Stéphane Blais, La Presse Canadienne