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L'accord Canada-États-Unis-Mexique sans valeur avec les droits de douane de Trump

durée 04h00
6 mars 2025
La Presse Canadienne, 2024
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Temps de lecture   :  

4 minutes

Par La Presse Canadienne, 2024

WASHINGTON — Les architectes canadiens et mexicains de l'accord Canada-États-Unis-Mexique disent que la guerre commerciale de Donald Trump a franchi une ligne qui anéantit essentiellement le pacte commercial continental, alors que les experts suggèrent que les actions du président sont destinées à ébranler les voisins les plus proches des États-Unis avant une révision obligatoire.

L'ancien négociateur commercial en chef du Canada, Steve Verheul, et l'ancien négociateur en chef du Mexique, Ken Smith Ramos, ont indiqué que les droits de douane dévastateurs suspendent essentiellement l'accord Canada-États-Unis-Mexique.

«Avec des droits de douane de 25 %, cela fait un trou complet dans l'accord commercial, a indiqué M. Verheul mercredi. Cela le rend pratiquement sans valeur pour nous. En fait, cela laisse le Canada et le Mexique dans une position bien pire que n'importe quel autre pays au monde».

Donald Trump a mis à exécution mardi sa menace d'imposer des droits de douane à l'échelle de l'économie canadienne et mexicaine, avec une taxe plus basse de 10 % sur l'énergie canadienne.

Ottawa a répondu en imposant des droits de douane de représailles sur 30 milliards $ de biens américains le même jour. D'autres droits de douane canadiens de 125 milliards $ devraient entrer en vigueur 21 jours plus tard.

La présidente mexicaine, Claudia Sheinbaum, a mentionné que son gouvernement annoncerait des droits de douane sur des produits ciblés et d'autres mesures dimanche. Elle a déclaré qu'«il n'y a aucun motif, aucune raison, ni aucune justification qui justifie cette décision qui affectera notre peuple et nos nations».

Le président américain a fait avancer les droits de douane sur le Canada en utilisant la loi sur les pouvoirs d'urgence économique internationale, une loi de sécurité nationale qui lui donne le pouvoir de contrôler les transactions économiques, après avoir déclaré l'état d'urgence sur le fentanyl à la frontière.

Mais les données des douanes et de la patrouille frontalière américaines montrent que seul un petit volume de fentanyl traverse illégalement les États-Unis depuis le Canada. Elles font état de seulement 13,6 grammes de fentanyl saisis par le personnel de la patrouille frontalière du nord en janvier.

M. Verheul a répété mercredi que l'excuse du fentanyl pour imposer des droits de douane n'était pas justifiée dans le cas du Canada. Il a soutenu qu'«absolument rien de tout cela n'est nécessaire».

Le premier ministre Justin Trudeau a avancé que, ce que M. Trump «veut, c'est voir un effondrement total de l'économie canadienne, car cela facilitera notre annexion». M. Trudeau a précisé que le Canada déposerait des plaintes contre les droits de douane auprès de l'Organisation mondiale du commerce et par le biais de l'Accord de libre-échange Canada-États-Unis-Mexique.

MM. Verheul et Ramos ont été des personnes clés lors des négociations de l'ACEUM sous la première administration Trump pour remplacer l'Accord de libre-échange nord-américain. Donald Trump l'a décrit à l'époque comme le «meilleur accord que nous ayons jamais conclu».

Les deux négociateurs se sont associés à Kevin Brady, un républicain du Texas, pour former la Coalition pour le commerce nord-américain, avec un cabinet d'avocats mondial.

L'objectif est d'unir leurs forces pour partager les avantages économiques et sécuritaires de l'accord, qui, selon eux, est devenu plus important et de plus en plus difficile sous le poids des droits de douane de l'administration Trump.

Une semaine tumultueuse

Les droits de douane imposés par Donald Trump contre le Canada et le Mexique ont provoqué une semaine tumultueuse à Wall Street — le premier test du plan tarifaire élargi du président.

Donald Trump a également ordonné le 12 mars des droits de douane de 25 % sur toutes les importations d'acier et d'aluminium aux États-Unis, qui, comme l'a confirmé la Maison-Blanche, s'ajouteraient aux autres droits imposés au Canada.

Le président américain a signé un décret exécutif pour mettre en œuvre des «tarifs réciproques» à partir du 2 avril. Les autres cibles tarifaires comprennent les automobiles, le cuivre, le bois d'œuvre et les produits agricoles.

Il a accordé mercredi une exemption d'un mois pour tous les véhicules passant par l'Accord Canada–États-Unis–Mexique après que les trois grands constructeurs automobiles — Stellantis, Ford et General Motors — ont eu une conversation avec le président.

Selon M. Ramos, lorsque les droits de douane s’accumulent, il est difficile de justifier la priorité accordée au commerce avec les États-Unis — des tarifs de 50 % sont équivalents à 5000 %.

«Cela n’a plus de sens», a-t-il statué.

Le Mexique agit en fonction des préoccupations du président concernant sa frontière, cherchant à élaborer un plan à long terme, mais M. Ramos a souligné que ce plan doit être distinct du commerce si l’on veut avoir des discussions de bonne foi sur un accord commercial.

La révision de l’ACEUM prévue pour 2026 pourrait avoir l’une des trois issues suivantes. Les trois pays partenaires pourraient soumettre des recommandations de modifications, modifier l’accord et signer pour une nouvelle période de 16 ans, ou l’un des pays pourrait également se retirer complètement de l’accord. La troisième issue possible verrait l’administration Trump, ou un autre pays, retarder le renouvellement, repoussant la question de 12 mois. Cela prolongerait probablement l’incertitude du marché.

Les architectes de l’accord affirment que la situation idéale est qu’ils modifient l’accord — bien que cela semble peu probable compte tenu de l’environnement géopolitique actuel.

«Les Canadiens pensent que les États-Unis ne sont plus un partenaire commercial fiable», a ajouté M. Verheul lors du lancement de la coalition à Washington.

M. Brady a affirmé que l'avenir des relations des États-Unis avec le Mexique et le Canada n'était plus clair. Les deux pays restent les plus gros clients des États-Unis, a déclaré le républicain, et l'accord a contribué à solidifier cette relation.

«Quitter cet accord ou le laisser expirer aura un impact très dommageable sur des millions de travailleurs et de familles américaines», a analysé M. Brady.

Kelly Geraldine Malone, La Presse Canadienne